Le Point d’égale pression, un peu de physiologie …
Guy Postiaux, Kinésithérapeute
Stéphane Otto, Licenciée en kinésithérapie, agrégée.
Groupe d’étude pluridisciplinaire stéthacoustique. B-6000 Charleroi.
Auteur correspondant : guy.postiaux@gmail.com
Web site : www.postiaux.com
Résumé
La notion de Point d’égale pression - PEP est une notion mécanique qui paraît obscure à beaucoup de kinésithérapeutes. La présente démonstration a pour objet d’en analyser le mécanisme physiologique et d’appliquer ces notions à l’adulte, l’enfant et au nourrisson broncho-obstructif . On peut le définir ainsi : « Le Point d’Egale Pression – PEP est le lieu de la bronche où lors des expirations forcées et uniquement lors des expirations forcées , la pression intrabronchique est égale à la pression extrabronchique ; on dit alors que la pression transmurale est nulle ». Cette occurrence modifie le calibre du segment bronchique d’aval qui consiste en un rétrécissement appelé « flow-limiting-segment, segment à flux limité « où la vitesse élémentaire des molécules gazeuses acquièrent une grande vitesse générant une interaction gaz-liquide, c’est-à-dire des forces de frictions susceptibles de décrocher les sécrétions. Les techniques expiratoires forcées sont la Technique de l'Expiration Forcée-TEF, la Toux Provoquée-TP et la Toux Dirigée-TD qui prennent le relais des techniques expiratoires lentes lorsque les sécrétions ont migré des voies aériennes moyennes vers les voies aériennes proximales qui constituent leur principal lieu d'action. Le choix d'une technique expiratoire forcée doit être adapté en fonction de l'âge du patient, nourrisson, enfant ou adulte.
1. Principes généraux
Les techniques expiratoires forcées, qu'elles soient actives, c'est-à-dire où l'intervention du patient est déterminante, ou passives, c'est-à-dire réalisées par le thérapeute, peuvent être classées en deux catégories : 1) les techniques expiratoires forcées qui comprennent dans leur mécanisme un temps de fermeture glottique, il s'agit des techniques de toux, la Toux Provoquée-TP chez le tout petit enfant incapable de coopérer ou la Toux Dirigée-TD chez le grand enfant. 2) les techniques expiratoires forcées qui ne comprennent pas dans leur mécanisme un temps de fermeture glottique, il s'agit des techniques d'expiration forcée proprement dites : essentiellement la Technique de l'Expiration Forcée-TEF, active ou passive, exécutée à différentes vitesses.
Elles ont en commun un mécanisme qui leur est propre : l'apparition lors de leur exécution d'un Point d'Egale Pression-PEP sur le trajet bronchique proximal. Quelle que soit la manœuvre, toux ou technique de l'expiration forcée, quel que soit le volume auquel la manœuvre est déclenchée, c'est-à-dire à haut, moyen ou bas volume pulmonaire, et quel que soit l'effecteur expiratoire, l'élément moteur en quelque sorte c'est-à-dire les muscles expiratoires eux-mêmes ou la pression manuelle appliquée sur le thorax et l'abdomen par le kinésithérapeute, ou encore les jaquettes utilisées au laboratoire de fonction pulmonaire pédiatrique pour l'étude des débits expiratoires maximaux , une composante de compression apparaît sur le trajet bronchique. Les caractéristiques d'écoulement de l'air et donc de mobilisation des sécrétions dans le réseau bronchopulmonaire vont en être modifiées. En termes de mécanique ventilatoire, ce phénomène est connu.
2. La mécanique ventilatoire en expiration forcée : adulte et grand enfant
Lors d'une expiration forcée, les facteurs mécaniques essentiels qui déterminent les débits et qui nous intéressent ici au premier chef sont, outre l'effecteur actif autonome (muscles) ou passif (pression externe): la qualité du recul élastique du poumon et l'apparition sur le segment bronchique d'un lieu remarquable appelé Point d'Egale Pression-PEP; nous ne prendrons pas en compte ici comme élément de démonstration la résistance à l'écoulement bien qu'également déterminante du débit. Au laboratoire de fonction pulmonaire, la courbe débit-volume est le résultat graphique le plus concret d'une expiration forcée. Avant d'analyser la morphologie de cette courbe, examinons le rôle des facteurs mécaniques cités.
2.1 Le PEP n'apparaît que lors de l'expiration forcée
Lors de toute tentative d'expiration forcée (Figure 1), qu'elle soit déclenchée à haut ou bas volume pulmonaire, ou que la force appliquée soit musculaire (active) ou manuelle (passive), la pression pleurale-motrice augmente brusquement, atteint des valeurs nettement supra-atmosphériques (encore dites positives). Cette pression pleurale possède alors une valeur intermédiaire entre la pression alvéolaire (somme de la pression pleurale et de la pression élastique) et la pression buccale ou atmosphérique. Transmise à tout le contenu intrathoracique, cette pression pleurale s'exerce sur l'ensemble de l'arbre aérien, de l'alvéole à la sortie sternale de la trachée. Le gradient de pression alvéolo-buccal ainsi créé est responsable d'une augmentation (brève) du débit bronchique représentée par la phase initiale de la courbe débit/volume (Figure 2) et tributaire de l’effort: le débit maximal est atteint avant même que 15% du volume pulmonaire ne soient expirés. La deuxième phase de la courbe débit-volume, qui survient après l'apparition du PEP, est peu influencée par l'effort et déterminée par la régulation du débit par les voies aériennes. Au cours de cette deuxième phase, le débit est décroissant.
Comme décrit à la Figure 1, le PEP est en fait le lieu bronchique où la pression extrabronchique (ou pleurale) est de valeur égale à la pression intrabronchique. Sa définition précise est: « le lieu de la bronche où, lors de l’expiration forcée – et uniquement lors de l’expiration forcée – la pression intrabronchique est égale à la pression extrabronchique (pleurale positive dans ce cas) ». Un peu en aval de ce point, un étranglement apparaît sur le trajet bronchique déterminant un segment dit "à flux limité" (car freinant le débit total d'amont et d'aval) (voir infra Figure 3). L'apparition du PEP a pour effet immédiat et fort important pour la suite de la démonstration, de séparer le trajet bronchique en deux secteurs, un secteur d'aval situé entre un lieu voisin du PEP et la bouche et un secteur d'amont situé entre l'alvéole et le PEP. En quoi diffèrent ces deux secteurs ?
2.1.1 Dans le secteur d'amont
La pression intrabronchique (somme de PA et de Ppl) est supérieure à la pression extrabronchique (de valeur égale à la pression pleurale), les voies aériennes sont dès lors soumises à des forces de distension. Il est très important de faire remarquer qu'à ce moment dans le secteur d'amont, qui représente quasi l'ensemble de l'arbre aérien, les débits et vitesses gazeux sont très faibles, déterminés par la seule force du recul élastique du poumon. Ceci signifie également que les forces de cisaillement du mucus bordant les voies aériennes sont aussi très faibles ; dès lors les forces d'arrachement ou de friction (interaction gaz-liquide) sont électivement situées dans le segment à flux limité, lieu de hautes vitesses aériennes. Donc, en appliquant la relation (2) : Pél=PA-Ppl, on peut voir que la pression motrice dans le secteur d'amont est la différence entre la pression alvéolaire totale et la pression au PEP, c'est-à-dire la pression de rétraction élastique pulmonaire, et celle-là seulement. Cette pression dépend entièrement des propriétés élastiques intrinsèques du poumon et du volume pulmonaire auquel la manœuvre est déclenchée.
EN PRATIQUE
Dès lors, on voit bien que la réduction du calibre bronchique aboutit essentiellement à une augmentation de vitesse du fluide et de ses éléments dans le segment à flux limité (flow limiting segment) où les vitesses gazeuses deviennent élevées et où s’applique l’interaction gaz - liquide responsable du décrochage des sécrétions par transfert d’énergie cinétique des molécules d’air circulant aux molécules de liquide (sécrétions) accolées à la paroi bronchique ainsi cisaillées et décrochées par les forces frictionnelles. On a pu ainsi mesurer, chez l'adulte sain, des vitesses linéaires au niveau de la trachée de l'ordre de 120 m/sec lors de l'expiration forcée et de 360 m/sec au niveau du larynx lors de la toux, c'est-à-dire une vitesse proche de celle du son! Chez l'enfant normal, cette vitesse peut atteindre 60m/sec.
Il est à noter que le débit expiratoire de pointe mesuré durant la toux chez des sujets normaux est supérieur à celui d’une expiration forcée. Le débit expiratoire de pointe est aussi moins rapidement atteint lors de l’expiration forcée que lors de la toux. Il s'agit donc bien d'une accélération des éléments du fluide, non du débit lui-même… A cette accélération "élémentaire" s'ajoute un changement de régime du débit qui, de laminaire ou mixte en amont (ou supposé tel), devient turbulent en aval en raison notamment du changement de vitesse. D'un point de vue physiologique, cette précision n'est pas sans intérêt puisqu'il a été établi qu'au niveau bronchique, c'est le facteur vitesse qui est responsable du décrochage des sécrétions grâce au transfert d'énergie entre les molécules d'air et les éléments de la couche de mucus, ce mécanisme est appelé: "interaction gaz-liquide"; cette interaction réalise le cisaillement des sécrétions bronchiques et autorise leur décrochage.
2.2 La courbe débit-volume: un débit globalement augmenté mais à dominante décroissant
Sa morphologie générale est bien connue, mais nous allons être amenés à considérer des courbes débit-volume particulières suivant qu'elles sont produites de manière active par le patient lui-même ou passive au moyen d'une pression thoraco-abdominale exercée par le kinésithérapeute, ainsi qu'à distinguer la courbe débit-volume du petit enfant de celle du grand enfant et de l'adolescent ou de l’adulte.
D'une manière générale, la courbe débit-volume comprend deux séquences bien distinctes: une première phase ascendante (voir supra Figure2, courbe A: de a à b), durant laquelle le débit croît, phase essentiellement dépendante de l'effort fourni et dite "effort-dépendante", que l'on peut parfois améliorer par l'entraînement musculaire respiratoire, et une seconde partie (voir supra Figure 2, courbe A: de b à c), à partir du point remarquable maximum appelé débit expiratoire maximal-DEM durant laquelle le débit ne fait que décroître. Au cours de cette phase, le débit acquiert des valeurs infranchissables, quelle que soit la force appliquée ou l'entraînement musculaire pratiqué pour tenter de l'augmenter. Ajoutons : et « quelle que soit la force manuelle appliquée au thorax d'un enfant ». Paradoxalement même, si la force expiratoire dépasse une certaine valeur, le débit diminue ce qui n'exclut pas une augmentation de la vitesse. Notons toutefois que de brèves pointes transitoires de débit peuvent excéder l'enveloppe maximale lors de la toux par exemple. Les valeurs de débit sur cette seconde partie de la courbe sont peu dépendantes de l'effort ou de la force appliquée et essentiellement déterminées par la valeur du recul élastique pulmonaire et des voies aériennes; pour cette raison, elle est dite "effort-indépendante".
Même s'il a surtout été étudié chez l'adulte, il faut d'emblée préciser que le modèle mécanique développé ci-après est applicable au nourrisson. En effet, l'analogie entre l'adulte et l'enfant peut être faite : les dynamiques sont tout à fait comparables, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Quelques variantes anatomo-physiologiques inhérentes à l'âge tel le type de recul élastique et la compliance particulière des éléments anatomiques au niveau des voies hautes doivent être prises en compte. Ces facteurs propres à l'enfant n'altèrent cependant en rien le raisonnement physico-mécanique fondamental qui vaut pour tous les âges mais ils obligent à reconsidérer l’utilité des manœuvres expiratoires forcées chez le petit enfant. L’ontogénie de l’appareil respiratoire de l’enfant apporte à cet égard des éléments intéressants.
2.3 Quel est l’effet de la pression appliquée à bas volume pulmonaire?
D'un point de vue théorique, lors de la TEF, une pression exercée à bas volume pulmonaire devrait engendrer un recul du PEP. En effet, rappelons que la pression alvéolaire est la somme de la pression pleurale et de la pression engendrée par le recul élastique du poumon. Lors de l'expiration forcée, la pression élastique et les résistances dans le secteur d'amont déterminent le débit ; toutes choses égales en ce qui concerne la pression pleurale, c'est la valeur de la pression élastique qui détermine le lieu d'apparition du PEP. Cette valeur est fonction de deux éléments: le volume pulmonaire auquel l'expiration forcée est déclenchée et la qualité du tissu pulmonaire lui-même.
2.3.1 Influence de la première variable : le volume pulmonaire
Lorsque l'expiration forcée est déclenchée à bas volume pulmonaire, un moindre recul élastique réduisant la pression alvéolaire devrait éloigner le PEP vers la périphérie ; l'affaissement du secteur d'aval devrait également être favorisé par la moindre tension élastique du tissu pulmonaire sous-tendant la paroi bronchique. Le modèle théorique (se reporter à la Figure 1 : traits discontinus) accrédite cette thèse et montre qu'à pression pleurale équivalente, le PEP devrait s'éloigner. Ce raisonnement s'appliquerait bien au nourrisson, puisque le volume auquel la TEF est le plus fréquemment déclenchée est la CRF. On peut aussi imaginer de la déclencher à plus bas volume pulmonaire encore au terme d'une expiration passive aidée, possibilité que nous analysons ici.
2.3.2 Effets de la seconde variable : la qualité du recul élastique pulmonaire
Rappelons qu'entre la naissance et l'âge adulte, le nombre d'alvéoles est multiplié par 12 ou 15 et augmente proportionnellement plus vite que la taille des voies aériennes (phénomène de dysanapsis):) : rapidement d'abord jusqu'à l'âge de plus ou moins 8 ans, plus lentement ensuite jusqu'à l'âge adulte. Ainsi la proportion de tissu pulmonaire à la naissance ne représente-t-il que 3% de ce qu'il sera à l'âge adulte. Ces éléments permettent d'affirmer, et les mesures fonctionnelles le confirment par ailleurs, que le recul élastique du poumon du jeune enfant est faible et qu'il augmentera avec la taille. Ces facteurs de développement ont donc des implications mécaniques qui peuvent ici aussi suggérer qu'un recul élastique faible pourrait participer à l'éloignement du PEP vers la périphérie.
Un déplacement du PEP peut être obtenu lors de la toux à bas volume pulmonaire, mais pas au-delà de la 4ème ou 5ème génération bronchique, c’est-à-dire qu’il est confiné dans l’arbre aérien proximal. Chez le nourrisson, le PEP ne dépasserait pas la trachée lors des expirations forcées (la toux par exemple) en raison du faible rapport anatomo - fonctionnel entre le tissu pulmonaire (nombre d’alvéoles restreint – 20% comparé à l’adulte) et les bronches toutes présentes à la naissance. Plus précisément, le PEP se situe dans la trachée lorsque la manœuvre est déclenchée à plein poumon c’est-à-dire à la CPT. Lorsque le poumon est empli aux trois-quarts et jusqu’au dernier quart, le PEP peut atteindre les bronches segmentaires ce que réalise la quinte de toux qui est une toux séquentielle à volumes pulmonaires décroissants sans ré inspiration, décrochant ainsi les sécrétions de manière séquentielle. Réalisé dans le dernier quart de la CV, il est douteux que le PEP atteigne les voies distales, la traction élastique du tissu pulmonaire environnant les petites bronches s’opposant à leur compression.
Chez les malades chroniques et le nourrisson, la notion de PEP permet également de démontrer le collapsus (affaissement) du « segment à flux limité (flow limiting segment) qui aboutit à la séquestration de l’air en amont du point de fermeture, ce qui rend les expirations forcées inopérantes voire délétères. C’est à partir de ces constatations que notre groupe a montré l’intérêt du concept des expirations lentes qui présentent un double avantage : évitement du collapsus proximal et des effets délétères afférents, et surtout évacuation des sécrétions occupant l’arbre aérien moyen.
Expérimentalement, chez l'adulte, il n'a pas été démontré que l'expiration forcée éloigne le PEP au-delà des segmentaires, même si l'expiration est déclenchée à bas volume pulmonaire. Une étude vidéobronchographique n'a pu objectiver le recul du PEP au-delà de la lobaire inférieure , mais elle était réalisée en décubitus latéral, ce qui modifie les compliances broncho-pulmonaires régionales.
Chez le petit enfant, on a pu mettre en évidence une plus grande compressibilité des voies respiratoires hautes, compressibilité encore accentuée par un recul élastique faible sous-tendant moins la paroi bronchique, et l'on a pu observer que le PEP s'y manifeste préférentiellement. Ceci semble notamment confirmé par la mesure de l'aire de section à laquelle apparaît le PEP qui est de 0,30 cm² ce qui correspond, d'après les études anatomiques, à la surface de section des bronches souches. Ce qui permet d'affirmer que chez le nourrisson le segment à flux limité (secteur d'aval) est localisé dans les bronches proximales durant les manœuvres maximales d'expiration forcée à haut ou bas volume pulmonaire. Les éléments fonctionnels et de développement qui viennent d'être mentionnés, invalident donc, chez le nourrisson, l'hypothèse d'un recul du PEP. Le contraire eût peut-être pu justifier le recours à la "TEF-AFE fractionnée".
3. La mécanique ventilatoire en expiration forcée chez le nourrisson <2ans
Les répercussions sur la mécanique ventilatoire des manœuvres physiques doivent être connues de sorte à différencier les manœuvres physiologiques des manœuvres non physiologiques. Les mécanismes intrinsèques qui gèrent la toilette bronchique et plus particulièrement les répercussions des manœuvres physiques sur la mécanique ventilatoire doivent faire l’objet d’une proposition expérimentée d'un modèle de référence mécanique. Notre groupe s’est livré à cette analyse mécanique en laboratoire. Rappelons que toute manœuvre de kinésithérapie exploite le principe fondamental qui consiste à appliquer des contraintes différentielles au système respiratoire via les variations de la pression pleurale ou de la pression transpulmonaire, gradient de pression pleuro-buccal.
Le comportement dynamique du système respiratoire doit donc être étudié d'une part au niveau de la variable d'entrée appliquée, la pression pleurale, d'autre part au niveau des variables de sortie résultantes : le débit et le volume mesurés à la bouche. La pression pleurale constitue donc la pression "motrice" du système (désignée Ppl sur les figures). La manifestation objective de l'évolution de la pression pleurale est son tracé graphique qui permet d'en apprécier la morphologie. Dans l'analyse qui suit, nous ne nous intéressons pas aux valeurs terminales, absolues de la pression pleurale, posant par hypothèse que si le thérapeute appuie avec la même force terminale dans tous les cas, les pressions terminales peuvent être équivalentes. Cependant, la manière d'atteindre cette pression terminale peut varier, c'est pourquoi il est pertinent d'en étudier l'évolution c'est-à-dire la forme ou la courbure des courbes et en fonction de celles-ci la morphologie des courbes de débit et de volume, dans l'espoir d'apprécier la validité mécanique de la manœuvre elle-même ou encore de comparer plusieurs manœuvres entre elles. D'une manière logique, considérons également que le but de la kinésithérapie respiratoire de toilette bronchique est l'expulsion d'un volume d'air à partir d'un quelconque débit, garantie d'une expulsion possible des sécrétions hors de l'appareil respiratoire. Autrement dit, posons que l'interruption du processus expulsif d'un volume doit être considérée comme préjudiciable à l'épuration bronchique.
3.1 Dans les états obstructifs du nourrisson, les débits spontanés sont déjà des débits maximaux
Ne nous intéressons qu'à l'aspect qualitatif ou morphologique de quelques courbes remarquables :
1) La méthode de mesure utilise l’HERES ® l'appareil affiche en continu les courbes de pression œsophagienne, de débit buccal et de volume expiré (respectivement les courbes 1, 2 et 3 de chaque tracé des figures 6, 8 et 9 désignées respectivement sur les figures : P, V' et V).
3.3 Analyse de quelques courbes individuelles
Cet exemple (Figure 6) concerne un enfant de 6 mois atteint d'une bronchiolite. Des sibilances et des craquements sont entendus lors de l'auscultation pulmonaire préalable à la mesure.
Les courbes de ES ont l'allure normale décrite plus haut. La courbe d’ELPr présente les mêmes caractéristiques de regain de pression (à taux de croissance dégressif) et de débit produisant un volume expiré progressivement croissant. Il s'agit donc là d'allures de courbes physiologiques. En revanche la TEF affiche un taux de croissance progressif de la pression pleurale et des interruptions du débit et du volume expiré. Cette séquestration de l'air intrathoracique dure le temps de la pression appliquée par le thérapeute. Cependant les courbes de TP présentent des allures tout à fait physiologiques de pression, de débit et de volume, alors qu'il s'agit également d'expirations forcées, avec la réserve que cette fois, l'effort de toux produit une expiration forcée d'origine musculaire propre, autonome, c'est-à-dire exercée par le patient lui-même et non par une pression externe appliquée par le thérapeute.
A propos de cet exemple, reproduit chez plusieurs patients, une comparaison tout à fait intéressante s'impose entre la courbe de TEF (en C sur la Figure 6) et celle de TP (en D sur la Figure 6). Dans les deux cas il s'agit bien d'une expiration forcée, mais la première est imposée par l’expérimentateur : elle est déclenchée par l'excitation trachéale produite lors de la pression digitale brève sur la trachée, tandis que la seconde est l'effet d'un effort expiratoire musculaire, autonome du petit patient. A l'évidence TP produit la "bonne" courbe, physiologique, de pression puisque son taux de croissance est dégressif alors que le taux de croissance de TEF est progressif et aboutit immédiatement à un arrêt expiratoire visible sur les courbes de débit et de volume. Ce fait est remarquable dans la mesure où l'on voit qu'une manœuvre imposée par le manipulateur est "refusée », elle ne parvient quasi jamais à reproduire celle que la "nature" a mise en place. Ceci incite en quelque sorte à la modestie face aux événements physiologiques que l'on tente de reproduire !
ELPr présente deux effets remarquables au niveau de la courbe de pression :
1) le taux de croissance de chaque regain de pression est dégressif, l'angle α diminue progressivement durant chaque montée expiratoire comme lors de l'expiration spontanée (tracé 1 sur la Figure 7),
2) la pression marque des ressauts inspiratoires correspondant à trois efforts inspiratoires suivis de trois phases de pression expiratoire au cours desquelles l'angle reste dégressif (α 1'< α 2'< α 3'). La courbe de débit accuse les variations correspondantes : des phases de regain qui se transforment en valeurs croissantes de volume expiré. Le sujet parvient donc avec succès à s'opposer à la poussée thoraco-abdominale exercée par l'expérimentateur, mais chaque tentative inspiratoire est néanmoins suivie d'une "production" de débit et de volume. Rappelons qu'il s'agit d'un enfant de 24 mois dont on apprécie ainsi la force des muscles inspiratoires.
L'élément le plus remarquable est constitué par la réaction mécanique du système respiratoire à un appui manuel brusque et maintenu que l'on produit lors de la TEF: la courbe de pression accuse un taux de croissance progressif de l'angle : par opposition à l'évolution de cet angle lors de ES et ELPr où le taux de croissance est dégressif (tracé 2 sur la Figure 7). La courbe de débit correspondante s'annule (Figure 8) ce qui se traduit par deux périodes durant lesquelles la courbe de volume s'horizontalise, signant une séquestration de l'air intrathoracique qui bute sur un obstacle. Ceci n'a évidemment pas lieu lorsque la voie aérienne est maintenue ouverte par la présence d'un tube endotrachéal qui soutient la paroi.
L’exemple rapporté ici constitue une situation rare où la TEF présente une allure de courbe de débit similaire à celle obtenue lors de TP, c'est-à-dire très acérée, avec faible volume expiré laissant supposer de grandes vitesses animant les molécules d'air expiré. Dans ce cas-ci, une courbe physiologique a pu être obtenue ; il s'agit de situations peu fréquentes: en effet selon notre expérience, c'est seulement dans 27% des cas que débits et volumes escomptés peuvent être observés lors de la TEF, encore est-il nécessaire de faire remarquer que les courbes de pression qui les ont produits affichent un taux de croissance dégressif. Ceci confirme le fait qu'un taux de croissance dégressif (angle α décroissant) de la courbe expiratoire de pression pleurale constitue bien le caractère basal différentiel des différentes situations ventilatoires, physiologiques c'est-à-dire efficaces sur les débits et volumes et non-physiologiques c'est-à-dire interrompant débits et volumes. Ici la TEF atteint en quelque sorte son objectif.
EN PRATIQUE
Autrement dit, d'un point de vue pratique, ce que le kinésithérapeute tente d'obtenir avec des pressions externes appliquées de manière abrupte, comme dans la technique de l'expiration forcée, est beaucoup mieux réalisé par le patient lui-même lors de la toux physiologique obtenue de manière réflexe sans qu'apparaissent les inconvénients de séquestration d'air ou de blocage glottique. Il est dès lors intéressant de s'interroger sur le "mécanisme protecteur du débit et du volume" qui préside à la réalisation d'un tel phénomène naturel. Ceci pourrait aussi signifier qu'une kinésithérapie efficace, et les études montrent l'intérêt du schéma thérapeutique associant ELPr et TP, est celle qui colle au plus près à la physiologie ! Il s'agit véritablement d'une "physio-thérapie", c'est à dire celle qui favorise une kinésithérapie qui va dans le sens des phénomènes mécaniques naturels ou physiologiques lorsqu'ils sont dépassés par l'importance de l'encombrement. N'en est-il pas de même des autres disciplines kinésithérapeutiques ? Il faut dès lors convenir que la TEF chez le nourrisson est plus utilement remplacée par TP qui sans doute génère des pressions intrathoraciques plus élevées mais durant des espaces de temps très bref avec un lieu similaire d'action c'est-à-dire les voies aériennes proximales. La toux présente en outre une efficience physiologique supérieure à une action manuelle brusque qui pourrait être appliquée à contretemps où à thorax fermé. Cet exemple est tout à fait démonstratif et confirmé dans la plupart des autres situations similaires et atteste la valeur intrinsèque de TP versus TEF.
Néanmoins, il n'est pas exclu que l'augmentation transitoire du débit observée lors de TEF puisse avoir un effet épuratif proximal ; cependant, comme dans l'exemple commenté ici, la courbe de débit ainsi obtenue est inférieure à celle d’une expiration spontanée, ce qui lui ôte vraisemblablement l'effet potentiel évoqué. On observe parfois, comme c'est le cas chez ce petit patient, qu'aussi longtemps que la pression manuelle est exercée, la séquestration de l'air subsiste alors qu'à ce moment la suppression du gradient de pression alvéole-point d'égale pression-PEP élève la pression dans le secteur d'amont au PEP à une valeur supérieure à la pression transpulmonaire et à celle du secteur d'aval. On devrait donc assister à une réouverture du segment et au lever immédiat du collapsus ou du blocage. Ce phénomène de séquestration soutenu ne trouve actuellement pas d'explication satisfaisante.
3.4 Des manœuvres physiologiques et des manœuvres non physiologiques
A partir des courbes de pression pleurale étudiées dans les quatre situations ventilatoires, ES, ELPr, TP et TEF, cette expérimentation permet d'identifier des traits communs à deux groupes de manœuvres. ES et TP affichent dans 100% des cas un taux de croissance dégressif de la pression motrice et ELPr dans la plupart des cas (92% dans cette expérience), c'est-à-dire une valeur décroissante de l'angle α au cours de la phase expiratoire (se reporter à la Figure 7); l'angle α est obtenu par la tangente à la courbe qui dans ces cas est concave vers le bas, en rapport avec débits et volumes escomptés. On doit donc considérer ces situations expiratoires comme des événements physiologiques puisque de surcroît le thérapeute n'y intervient pas directement ; lors de la toux, sa seule intervention consiste à déclencher le phénomène par voie réflexe, c'est-à-dire en excitant la trachée extrathoracique au moyen d'une pression digitale brève ; l’expérimentateur n'intervient donc pas dans la réalisation de la manœuvre que le patient réalise lui-même.
En revanche, la TEF obtient dans la plupart des cas (78% des cas dans cette expérience) une courbe à taux de croissance progressif, c'est-à-dire une augmentation progressive de l'angle α obtenu par la tangente à la courbe qui est dès lors concave vers le haut. Parallèlement, ELPr obtient des débits et des volumes expirés conservés voire augmentés (même si la courbe de débit est fractionnée, à ressauts) tandis lors de TEF, les débits s'effondrent et les volumes sont interrompus dans la grande majorité des cas ; ceci signifie qu'une séquestration de l'air intrathoracique a lieu en amont d'un lieu de fermeture qui correspond soit au collapsus bronchique proximal, soit à une fermeture de glotte.
En fait, l'élément à prendre en compte ici est l'arrêt des débits et des volumes qui conduit à soumettre le thorax à une force de compression inutile qui pourrait s'avérer délétère. De toute façon, ayant posé comme postulat initial qu'une émission de sécrétions ne peut se faire que simultanément à l'émission d'un volume d'air, cette manœuvre est vaine quant au but recherché. De surcroît, on peut observer que le volume d'air initial obtenu en début de courbe de TEF reste inférieur à celui d'une expiration spontanée !
La courbe de débit obtenue par ELPr présente une allure caractéristique faite de regains visibles durant toute la durée de la pression appliquée ce qui aboutit surtout à un volume expiré global plus important que lors d'une expiration spontanée. (Figure 9) C'est bien le but poursuivi par la manœuvre : obtenir la meilleure déflation pulmonaire possible qui nous paraît l'élément épuratif dominant de la toilette bronchique, davantage que le rôle des débits. Avec la possibilité d'une action plus distale dans l'arbre trachéo-bronchique.
Il convient cependant de faire remarquer que l’ELPr échoue dans une certaine proportion de cas (31% d'après nos propres mesures) affichant des effets similaires à la TEF. Quoique cela ne soit pas la majorité des réactions, ceci montre bien la difficulté d'augmenter débits et volumes de manière artificielle chez le nourrisson. Cette difficulté nous permet d'attirer l'attention sur la nécessité d'une formation des jeunes praticiens sous l'égide d'un thérapeute confirmé.
En résumé, ces résultats montrent que ce qui distingue bien une courbe physiologique d'une courbe non physiologique est son taux de croissance, c'est-à-dire la courbure de la courbe :
- un taux dégressif a le plus de chances d'obtenir débits et volumes escomptés,
- un taux progressif produit la plupart du temps une séquestration de l'air intrathoracique.
On peut concevoir qu'à propos d'une technique "de soins" si populaire, une telle conclusion soit inattendue mais il est nécessaire de rappeler que d'une part cette technique n'a fait l'objet d'aucune approche analytique de type mécanique telle que celle rapportée ici, que d'autre part la validation scientifique de cette méthode fait défaut. Par conséquent, en l'absence de données contradictoires aux résultats rapportés ici, ne convient-il pas, d'un strict point de vue éthique (et de sécurité), d'en conseiller le retrait des protocoles thérapeutiques et de l'usage courant ? D’autres études postérieures à l’analyse mécanique décrite ici ont apporté leur lot d’effets secondaires délétères de la TEF/AFE (fractures de côtes, déstabilisation respiratoire, vomissements…) qui nous font dire que cette technique constitue un acte de « maltraitance » et devrait être écartée des pratiques. La revue Cochrane émet les mêmes réserves.
Ces considérations ne peuvent cependant pas être transposées de manière absolue au plus grand enfant (> 2 ans), chez qui la TEF paraît plus aisément réalisable en raison du caractère anatomique de la trachée intrathoracique qui s'avère plus rigide chez le plus grand enfant du fait de la plus grande maturation structurale des anneaux cartilagineux trachéaux. La trachée du tout petit est éminemment compliante donc compressible, ce que confirmeraient les situations de séquestration observées sur les courbes de manière quasi systématique lorsque la pression manuelle appliquée est un peu trop élevée. Rappelons que ceci n'a pas lieu lorsqu'un tube endotrachéal garantit la stabilité et la rigidité de la paroi.
EN PRATIQUE
1) à promouvoir des manœuvres physiologiques de toilette bronchique telles l'ELPr et la TP dont l'association thérapeutique a par ailleurs fait l'objet d'études de validation.
Références

Figure 1
Rapports de pression au cours de l'expiration forcée.
L'expiration forcée débutée à haut volume pulmonaire (traits continus sur la figure) situe le Point d'Egale Pression dans les segments bronchiques proximaux (PEPhv). La relation (1) (voir texte) vaut dans l'exemple pris ici: Palv=Pél+Ppl, soit 40=30+10. Lorsqu'elle est débutée à bas volume pulmonaire (traits discontinus sur la figure), le gradient de pression entre l'alvéole et le PEP diminue (à cause du moindre recul élastique, suivant la même relation (1): 35=30+5, chiffres entre parenthèses), avec pour effet d'éloigner le PEP (PEPbv), de raccourcir le secteur d'amont (de la longueur du vecteur A à celle du vecteur A') et d'allonger le secteur d'aval (de la longueur du vecteur B à celle du vecteur B').
Ppl: pression pleurale, Palv: pression alvéolaire, Pél: pression due au recul élastique, Pbr: pression intrabronchique, Pbucc: pression buccale ou atmosphérique, PEPhv: point d'égale pression à haut volume pulmonaire, PEPbv: point d'égale pression à bas volume pulmonaire.
(d'après Postiaux G., Lens E. De ladite "Accélération du Flux Expiratoire (AFE)": où Forced is…Fast (Expiration technique-FET). Ann Kinésithér 1992;19,8:411-27.)

Figure 2
Courbes débit-volume comparées d'une expiration maximale volontaire chez le grand enfant, d'une expiration forcée passive chez le nourrisson et de la ventilation de repos.
A: courbe d'une expiration maximale volontaire (à partir de la capacité pulmonaire totale (CPT) dans le cas du grand enfant coopérant poursuivie jusqu'au volume résiduel (VR)
B: courbe d'une expiration maximale produite par pression externe au départ de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) chez le jeune enfant non-coopérant
C: courbe de la ventilation spontanée de repos.
En ordonnée: le débit V', en abscisse: le volume V., a-b: phase ascendante "effort-dépendante"
b-c: phase décroissante "effort-indépendante", DEM: débit expiratoire maximal.
(d'après Postiaux G., Lens E. De ladite "Accélération du Flux Expiratoire (AFE)": où Forced is…Fast (Expiration technique-FET). Ann Kinésithér 1992;19,8:411-27.)

Figure 3
Segment bronchique en aval du point d'égale pression: (segment dit "à flux limité")
En aval du point d'égale pression (PEP) la bronche subit une composante de compression qui réduit sa lumière. La configuration bronchique est celle du modèle connu de la tuyère de Laval où pression-p (courbe a) et vitesse-v (courbe b) varient en proportion inverse (effet "chute d'eau"). Au point d'étranglement (Pét), les vitesses linéaires sont augmentées en raison de la réduction de la section du conduit (V1 < V2 > V3), alors que le même débit est conservé (V1=V2=V3).
v: vitesse, p: pression, PEP: point d'égale pression, Pét: point d'étranglement, x-y sens du flux, l,m,n: lignes de flux, a: courbe de pression, b: courbe de débit aux points 1,2,3.
(d'après Postiaux G., Lens E. De ladite "Accélération du Flux Expiratoire (AFE)": où Forced is…Fast (Expiration technique-FET). Ann Kinésithér 1992;19,8:411-27.)

Figure 4
Dynamique trachéale lors de la toux chez le petit enfant. Le débit augmente de 7 fois et la vitesse linéaire de 42 fois, tandis que la section trachéale est réduite à son sixième. (d’après Comroe JH. Physiology of respiration, 2nd Ed. Chicago, yearbook Medical Publishers, 1974,p130.)

Figure 5
Débits normaux et pathologiques chez le jeune enfant.
Courbes débit-volume lors de l'expiration spontanée au repos (A) et lors de l'expiration forcée (B) d'un enfant atteint de bronchiolite (Bl) et d'un enfant normal (Nl). Noter que dans la bronchiolite, les débits spontanés mesurés au repos atteignent déjà des valeurs de débits maximales que l'on ne peut quasiment pas dépasser lors de la manœuvre forcée.
(d'après Smith DW., Rector DM., Derish MT., Frankel LR., Ariagno RL. Pulmonary function testing in infants with respiratory syncitial virus bronchiolitis requiring mechanical ventilation. Pediatr Infect Dis J 1990;9:S108-S111.)

Figure 6
Il s'agit d'un enfant de 6 mois atteint d'une bronchiolite. Des sibilances et des craquements sont entendus lors de l'auscultation thoracique. Les valeurs basales de la résistance pulmonaire: 128 hPa.S/l (valeur prédite: 33,28 hPa.s/l) et de l'élastance dynamique: 508,5 hPa/l (valeur prédite: 88,16 hPa/l) témoignent d'un syndrome obstructif bronchopulmonaire important.
Relations pression(1)/débit(2)/volume(3):
A. ES:
Considérant la phase expiratoire a1-a2.
La courbe de pression affiche un taux de croissance dégressif (*1>*2>*3). La courbe résultante de débit montre une nette convexité dirigée vers l'axe des volumes, signe d'un trouble ventilatoire obstructif important. La courbe de volume n'est pas régulière, elle marque un ressaut, signe possible de la difficulté expiratoire.
B. ELPr:
Elle est appliquée de b1 à b2, et durant toute la durée de la poussée, deux tentatives inspiratoires ont lieu (en 1 et 2) avec reconstitution de la courbe de pression qui à chaque reprise, présente les mêmes caractéristiques d'un taux de croisance dégressif (*1>*2>*3 et *4>*5>*6). La courbe de débit montre des phases de regain qui se traduisent par un volume progressivement croissant.
C. TEF:
Appliquée de c1 à c2, la courbe de pression affiche un taux de croissance progressif: *1<*2<*3, la courbe de débit montre un bref débit de pointe initial qui n'excède pas celui de la courbe de ventilation spontanée qui précède. Le débit est rapidement interrompu par un arrêt expiratoire (flèche sur la figure) nettement visible sur la courbe de volume expiré qui s'horizontalise (*) (trappage de l'air intrathoracique). Une tentative inspiratoire (flèche sur la figure) suivie de relâchement ne montre aucun effet de débit ni donc de volume. Ce trappage dure durant tout le temps d'application de la pression manuelle de l'expérimentateur.
D. TP:
La pression trachéale est exercée en d1, elle est immédiatement suivie d'une pression à direction inspiratoire (*: inspiration préparant l'effort de toux) puis d'une hausse de pression à direction expiratoire accompagnée de l'apparition d'un pic de débit très acéré et d'un faible volume expiré. Trois efforts de toux succesifs (T1,T2,T3) de ce type ont lieu à partir du même seul phénomène d'excitation trachéale. Lors de chaque effort tussif, la morphologie de la courbe de pression est identique, affichant chacune un taux de croissance dégressif: *1>*2>*3.
(d'après Postiaux G., Lens E. Proposition d'une kinésithérapie respiratoire confortée par l'équation de Röhrer. Ann Kinésithér 1995;22,8:342-54.)

Figure 7
La dérivée renseigne sur la courbure de la courbe représentative.
Soit une courbe y=f(x) croissante dans l'intervalle considéré AB.
Dans les deux cas, entre A et B, la pente, donc la dérivée est toujours positive mais l'on voit qu'en 1, si la courbe est concave vers le haut, la pente tout en restant positive ira en augmentant de A vers B, l'angle * augmente, ce qui veut dire que la dérivée croît dans cet intervalle (c'est le cas dans les exemples mentionnés de TEF"AFE" où *1 < *2 < …).
Au contraire, si la courbe est concave vers le bas comme en 2, la pente tout en étant toujours positive, ira en diminuant de A vers B, l'angle * décroît, ce qui veut dire que la dérivée décroît dans cet intervalle (c'est le cas dans les exemples mentionnés de ES, ELPr et TP où *1>*2…).
(d'après Postiaux G., Lens E. Proposition d'une kinésithérapie respiratoire confortée par l'équation de Röhrer. Ann Kinésithér 1995;22,8:342-54.)

Figure 8
Relations pression(1)/débit(2)/volume(3) obtenues lors de la TEF.
1. le débit expiratoire maximal augmente nettement sous l'effet de la pression appliquée même peu brusque dans ce cas; puisque le calibre se réduit sous l'effet de l'expiration forcée, on peut supposer que durant cette phase transitoire, on obtient une augmentation de la vitesse;
2. ensuite et très rapidement les débits s'effondrent (en M1 et M2) de manière significative nettement en dessous du débit produit en ventilation spontanée jusqu'à l'interruption du débit lui-même. Cet effondrement est tel que les tracés de volume en plateau en N1 (lorsque la pression est exercée à volume pulmonaire moyen) et N2 (pression exercée à bas volume pulmonaire) témoignent d'un obstacle expiratoire net. Cette interruption prématurée de l'expiration signe une séquestration de l'air intrathoracique (vraisemblablement produite par un collapsus trachéo-bronchique). L'énergie déployée à ce moment par la pression externe appliquée par le kinésithérapeute sur le thorax-abdomen est alors essentiellement dissipée en compression de l'air intrathoracique qu'objective l'élévation très importante de la pression œsophagienne (en O1 et O2); il s'agit en fait d'une manœuvre passive de Valsalva.
3. enfin, de convexe vers le haut (en A), la courbe du débit expiré devient concave (en M) vers l'axe des volumes, ce qui peut être interprété comme une nette augmentation de la résistance dans le secteur d'amont (ce qui accentue encore le caractère délétère de la manœuvre), si l'on admet que le débit est directement proportionnel à la pression élastique et inversement à la résistance dans ce secteur.
M1,2: interruptions de la courbe de débit expiratoire à moyen et bas volumes pulmonaires, N1,2: interruptions des courbes de volume expiré lors de la pression exercée à moyen (N1) ou bas (N2) volume, O1,2: élévations de la pression œsophagienne.
(d'après Postiaux G., Lens E. De ladite "Accélération du Flux Expiratoire (AFE)": où Forced is…Fast (Expiration technique-FET). Ann Kinésithér 1992;19,8:411-27.)